Etienne, nous nous sommes rencontrés a Lyon il y a une dizaine d'année, sans doute a la salle d'escalade, et je me rappelle que rapidement en essayant de faire les mêmes blocs que toi j'avais dû me faire ma première poulie...
Nous nous étions plutôt bien trouvés au final, nous avions le même type d'envies et le même type de problème, un boulot pas si marrant et pas assez de temps pour aller en montagne. On aimait la musique, les soirées, et débattre de philosophie décalée, et d'amour.
On s'enflammait régulièrement pour des projets souvent bien foireux en montagne, sur la base de topos qui nous faisaient rêver, et le vendredi soir arrivait, on était dans les startings blocs pour partir de Lyon après le boulot. Avec un petit pied à terre dans la vallée tout était possible.
Mais trois fois sur quatre ça tombait a l'eau a cause de la météo... Je suis retombé sur nos échanges de mails, où on arrivait a plus de trente mails pour l'organisation d'un seul petit we. On en avait du temps à perdre devant nos écrans, où on se répondait à coups de topos, et ça partait dans tous les sens, de récits de sorties pour essayer de cerner les conditions, et d'extraits de bulletins météo pour essayer de résoudre la quadrature du cercle, en essayant de plier la réalité a nos désirs ... pour finalement se rabattre sur une séance de salle et quelques pintes en ville en élaborant des stratégies amoureuses... Voilà, y'a pas les condis, c'est comme ça.
Au final on a quand même réussi à faire quelques croix, et je crois que tout ce qu'on a fait ensemble m'a permis de boucler ma liste pour le proba ..
Sur la photo, un bivouac de rêve dans République bananière sur l'aiguille de la République. On s'était cru bien malins de partir sur deux jours avec le bivouac, mais quelle mission pour tout monter a la moitié de la face ! Le lendemain en faisant l'aller retour au sommet, on avait eu l'impression de voler tellement on était léger.
Puis un jour on s'est moins vu, des trajectoires de vie lancées au pas de course, et il faut dire que tu n'étais pas toujours facile a suivre dans tes passions, elles avaient cette intensité et cette ardeur qui peuvent parfois décontenancer, et nous avons suivi des voies parallèles.. Au moment de nous retrouver, la course s'arrête brutalement pour toi, nos derniers messages resteront donc sans suite, c'est dur a concevoir et a accepter.
Bravo pour tout ce que tu as réalisé, ce que tu étais devenu, j'ai l'impression que tu étais là où tu voulais être. La montagne n'est peut-être ni juste ni injuste, elle prend autant qu'elle donne, a ceux qui s'exposent et se livrent à elle, elle réserve un chemin singulier, c'est un choix qu'on fait dès le départ lorsqu'on marie son destin à son immensité, mais quand on en arrive là, le vide laissé derrière soi est terrible, et pour ceux qui restent, la tristesse est immense.
Toutes mes condoléances et toutes mes pensées pour tes proches, qui partageaient ton quotidien de près ou de loin.
Merci pour ce que tu nous as apporté tout au long de ton existence.